Créer un site internet

Achenheim (France) : Fureur meurtrière néolithique

Une équipe d’archéologues de l’Inrap vient de mettre au jour les vestiges d’un massacre vieux de plus de six mille ans, à Achenheim (Bas-Rhin). Cette importante découverte illustre un cas de violence qui a sévi dans l’Europe du Néolithique.

INRAP

Source - http://www.inrap.fr/fureur-meurtriere-neolithique-achenheim-11213

Plus de 300 de silos, dont la plupart abritait céréales ou autres denrées, ont été découverts lors de cette fouille prescrite par l’État (Drac Alsace Champagne-Ardenne Lorraine). Ils se trouvent à l’intérieur d’une vaste enceinte, matérialisée par un puissant fossé en V, dont les entrées sont protégées par des sortes de bastions. Ce dispositif défensif évoque des temps troublés, une période d’insécurité, qui, au Néolithique moyen entre 4400 et 4200 avant notre ère, forcent les populations à se protéger.

DIX INDIVIDUS, VICTIMES D’UNE VIOLENCE EXTRÊME

Vue generale du silo 124 c philippe lefranc inrapVue générale de la fosse 124 – Philippe Lefranc / Inrap

La structure 124 est un vaste silo de près de 2,5 m de diamètre. Six individus y gisent, sur le dos, le ventre ou le côté, parfois entremêlés. Leurs positions laissent supposer qu’ils ont été abandonnés dans la fosse, sans autre ménagement... Ce macabre dépôt se compose de cinq adultes et d’un adolescent, tous des hommes. Les squelettes sont complets, même si certains ossements sont isolés. Tous présentent de nombreuses fractures aux jambes, mains, pieds, côtes, clavicules, crâne et mandibule.

Un membre superieur presentant plusieurs fracturesc philippe lefranc inrapUn membre supérieur présente plusieurs fractures au niveau du bras et de l'avant-bras - Philippe Lefranc / Inrap
Trois membres supérieurs gauches d’adultes, exhumés l’un à côté de l’autre, et un bras d’immature, avec avant-bras et main, coupé à mi-humérus, attestent la présence de quatre autres individus.

Detail des nombreuses fractures sur un crane dhomme adulte c michel christen inrapDétail des nombreuses fractures visibles sur un crâne d'homme adulte – Michel Christen / Inrap
Cette violence collective porte sur les vivants, mais s’acharne aussi sur les morts. Ce dépôt de cadavres est constitué en un temps, et évoque une même tuerie, un même conflit.

Armature de fleche retrouvee dans la region du bassin dun homme adultec philippe lefranc inrapArmature de flèche retrouvée dans la région du bassin d'un homme adulte présent dans la fosse – Philippe Lefranc / Inrap

NAISSANCE DE LA GUERRE

La Préhistoire n’a sans doute jamais été un âge tendre. Toutefois, les premiers conflits ou violences de masse émergent entre 12 000 et 10 000 ans, dans des sociétés prénéolithiques. Les archéologues en ont retrouvé les traces au Djebel Sahaba, au Soudan et à Nataruk au Kenya.
Depuis quelques années, les recherches sur la violence dans les premières sociétés agropastorales néolithiques se sont accélérées en Europe. Vers 5000 avant notre ère, l’extermination de toute une communauté à Talheim (Bade-Wurtemberg) en est un saisissant exemple, d’autant que les agresseurs appartiennent à la même entité culturelle que leurs victimes. Les tueries d’Asparn-Schletz en Autriche et de Herxhiem dans le Palatinat renforcent alors l’hypothèse d’une vaste crise à la fin de la culture dite « de la céramique rubanée ».   
En France, la découverte de Bergheim, au nord de Strasbourg, en 2012, est l’illustration de ces carnages néolithiques. Dans une fosse, gisaient huit individus, décédés simultanément. Sous eux, au fond de la fosse, reposaient sept membres supérieurs gauches amputés au niveau du bras. Achenheim et Bergheim sont contemporains.
Pourquoi ces mises à mort, cet acharnement sur des cadavres et ces mutilations, si ce n’est l’expression d’une fureur guerrière ritualisée ?