INRAP
Source - http://www.inrap.fr/archeologie-preventive/Actualites/Communiques-de-presse/p-18113-C-etait-la-Sous-nos-pieds...-Decouvertes-archeologiques-de-la-Ligne-a-grande-vitesse-Est-europeenne.htm
Le Parc archéologique européen de Bliesbruck-Reinheim accueille, du 16 mai au 30 septembre 2014, l’exposition « C’était là ! Sous nos pieds… Découvertes archéologiques de la Ligne à grande vitesse Est européenne ». Consacrée aux résultats des recherches archéologiques menées sur le tracé de la ligne, en Lorraine et en Alsace, elle présente 6 000 ans d’histoire du territoire. Née de la volonté commune de l’Inrap, du ministère de la Culture et de la Communication, de Réseau ferré de France et du PAIR, cette exposition (bilingue français-allemand) sera itinérante jusqu’en 2017.
Un voyage dans le temps
Rapprocher Paris de Strasbourg, tel est l’objectif de la ligne à grande vitesse est-européenne, aménagée par Réseau ferré de France. Le premier tronçon a été mis en service en juin 2007. Le second, long de 106 km, permettra de réduire le temps de parcours actuel de 30 minutes (1h50). Dans ce cadre, l’Inrap, le pair et le service archéologique du Conseil général de Moselle ont fouillé plus de 40 sites, entre 2008 et 2011, mettant en évidence des peuplements et des occupations très anciennes du territoire, depuis le Néolithique (5 400 avant notre ère) jusqu’à la Première Guerre mondiale.
Vue aérienne du site de fouille de Eckwersheim, Bas-Rhin, Alsace, 2013 © Aerial Photo, Inrap
De la Lorraine à l'Alsace, 7500 ans d'histoire
Au Néolithique, les premières sociétés sédentaires ont laissé leur empreinte dans le sol au travers de nombreux silos à grain, de fragments de torchis et de sépultures.
L’âge du Bronze (2 200 à 800 avant notre ère) se caractérise par de nouvelles pratiques funéraires ainsi que des échanges ou influences avec la Méditerranée. En témoignent par exemple des perles de verre importées d’Italie et déposées dans une incinération à Dolving (Moselle). La tribu gauloise des Médiomatriques occupe ensuite le territoire.
Les archéologues ont découvert en Moselle une vaste résidence aristocratique, qui deviendra, à la période romaine, une luxueuse villa.
Les fouilles ont également mis au jour des collections intéressantes du Moyen Âge, notamment une fibule incrustée de grenats. L’exposition se termine avec la tombe de deux soldats à Sarraltroff, victimes des premiers combats de la Première Guerre Mondiale.
Une exposition au fil du tracé
L’exposition présente, sur plus de 300 m², les plus importantes découvertes de ces fouilles. La scénographie, assurée par Zen+dCo, s’appuie sur un mobilier « muséo-transformable » fait de grandes plaques d’aluminium pliées. Organisée en trois sections, l’exposition permet de découvrir les modes de vie des différentes civilisations qui se sont succédé dans la région : « Habiter, cultiver, consommer » ; « Fabriquer, échanger, se déplacer » ; « Croire, mourir, se souvenir ». Le visiteur est accueilli par un atlas interactif retraçant les découvertes archéologiques du tracé. Plus de 500 objets archéologiques sont présentés pour la première fois au public : situle de bronze d’influence étrusque du site d’Eckwersheim (Bas-Rhin), bague en or et dépôt monétaire, trésor de monnaies d’argent de la fin de l’indépendance gauloise de la villa gallo-romaine de Bassing (Moselle)
« Habiter, cultiver, consommer »
Les découvertes réalisées sur le tracé de la ligne à grande vitesse est-européenne témoignent de la diversité des modes d’occupation rurale au cours des millénaires. Homo sapiens a longtemps été un chasseur-cueilleur nomade. Il se sédentarise dès le Néolithique, à partir de - 5400 en Lorraine et Alsace. L’âge du Bronze (- 2200 à -800) et l’âge du Fer (- 800 à - 52) correspondent au développement d’une organisation territoriale et d’un artisanat de plus en plus spécialisé. La romanisation s’accompagne de profonds changements économiques et culturels qui se traduisent notamment dans la langue, la religion et l’alimentation. Déstabilisé par d’importants mouvements de populations, l’Empire romain décline autour de l’an 500. Le premier Moyen Âge (Ve - XIe siècles) est essentiellement rural. Le second Moyen Âge (XIIe - XVIe siècles) est celui de l’essor urbain et du morcellement des territoires en possessions épiscopales, seigneuries et ville libres.
Clé de coffre en alliage cuivreux (bronze) découverte sur le site de Bassing (Moselle), période Augustéenne © Bruce Aufrère, Inrap
« Fabriquer, échanger, se déplacer »
Les archéologues exhument nombre d’objets, fabriqués ou échangés. Au Néolithique, le silex reste le matériau de prédilection pour produire outils et armes. Les haches et herminettes, finement polies, en sont les meilleurs exemples. Parfois issus de contrées lointaines, bien des objets circulent : à l’âge du Bronze, des perles d’ambre, cette résine originaire des bords de la mer Baltique, sont présentes dans des tombes de la nécropole alsacienne d’Eckwersheim ; en Lorraine, à Dolving, des perles de verre proviennent de la région de Frattesina, dans le nord de l’Italie ; enfin, la situle de bronze découverte dans la tombe d’un aristocrate d’Eckwersheim appartient à la civilisation étrusque.
Découverte dans une tombe de la nécropole d’Eckwersheim, cette situle de bronze (du latin situla, seau) est liée à la civilisation étrusque. Cette culture, d’une grande richesse, s’est imposée dans la majeure partie du territoire italique et au-delà entre le IXe et le IVe siècle avant notre ère. L’aristocrate inhumé avec cette situle, au début de l’âge du Fer, entendait montrer ainsi son raffinement. © Alex Flores, Inrap
« Croire, mourir, se souvenir »
À défaut de pouvoir comprendre les rites, les archéologues perçoivent les pratiques funéraires et religieuses. Celles-ci sont d’une grande variété et nous paraissent parfois bien étranges. Vers 3800 avant notre ère, à Gougenheim, 43 individus sont inhumés dans des positions variées, parfois dans des silos destinés au stockage du grain. Parmi eux, deux femmes ont été ensevelies simultanément.
Dans un trou d’obus, deux Poilus ont été retrouvés, sur le dos, à Sarraltroff. Tombés au combat entre le 18 et le 20 août 1914, ils reposent désormais au cimetière de Sarrebourg.
Durant l’âge du Bronze, à Eckwersheim, on se fait inhumer. Toutefois, à cette époque, la crémation est la pratique funéraire la plus fréquente ; c’est le cas de la nécropole de Dolving, en Moselle. Prélevés sur le bûcher, les ossements et les parures sont déposés dans l’urne cinéraire. L’incinération se généralise à nouveau au cours de l’Antiquité pour disparaitre au Moyen Âge.
Les archéologues approchent les pratiques religieuses au travers des sanctuaires, à l’instar de celui d’Eckartswiller, où un bas-relief du dieu Mercure des IIe et IIIe siècles de notre ère a été découvert.
Tombe d’une jeune Gauloise dans un silo, Mittelhausen, Bas-Rhin © Yohann Thomas, Inrap
Le Parc Archéologique européen de Bliesbruck-Reinheim
Il est situé à l’Est du département de la Moselle dans la vallée de la Blies, à 10 km de Sarreguemines (France) et 25 km de Sarrebruck (Allemagne) et propose au public la découverte d’une vaste villa gallo-romaine et la reconstitution d'une nécropole renfermant notamment la tombe de la Princesse de Reinheim. Site pionnier, il est développé aujourd’hui par le conseil général de la Moselle aux côtés de ses partenaires allemands. De part et d’autre de la frontière, une même volonté : mener une archéologie de pointe, avec une très forte implication scientifique, tout en rendant cette discipline accessible au public.