L'ancienne cité d'Anfa est un mystère et la ville blanche, bâtie sur l'emplacement de l'ancienne cité d'Anfa, hérite des légendes et des vieilles histoires autour du mythe. De vieilles histoires qui se confirment souvent par des découvertes préhistoriques et la dernière en date est une incisive humaine dans la grotte des rhinocéros de la carrière Oulad Hamouda, datant de plus de 450 000 années. «Il s'agit d'un site exceptionnel au niveau mondial puisque nous avons trouvé dans cette grotte plus de 15 crânes de rhinocéros blancs», explique Abderrahim Mohib, conservateur principal des monuments et sites au ministère de la Culture et co-directeur du programme maroco-français «préhistoire du grand Casablanca». «Ce qui est d'autant plus intéressant, c'est qu'avec cette dernière découverte, nous sommes certains de trouver d'autres restes humains», continue la même source.
En effet, les recherches archéologiques se font à deux niveaux. Le premier est daté de plus d'un million d'années et représente les traces de l'occupation humaine jusqu'à aujourd'hui, et on y trouve de l'outillage ou des restes d'animaux. Quant au second niveau, qui date de 500 000 à 700 000 années, il constitue une grotte à hominidés où il y a eu plusieurs découvertes de restes humains. «Entre 1994 et 2009, nous avons découvert 6 prémolaires et incisives ainsi qu'un mandibule adulte et un fragment de mandibule d'enfant», explique Abderrahim Mohib qui soutient que les découvertes au niveau du Grand Casablanca sont riches et importantes, puisqu'elles ont été publiées au nouveau mondial. Sont également responsables du programme maroco-français, en partenariat avec le ministère de la Culture marocain, les ministère des Affaires étrangères en France et deux instituts de recherche archéologique en France et au Maroc, qui effectuent deux fois par an des recherches poussées. «Nous avons deux campagnes en avril-mai et en octobre-novembre», explique Abderrahim Mohib. Des campagnes fructueuses qui permettent de mettre à jour des trouvailles majeures.
Des trouvailles qui sont en danger, puisque les carrières ne sont pas protégées, encore moins conservées. «Il y avait énormément de carrières à Casablanca, aujourd'hui il n'en reste que 4 et elles ne sont pas protégées», rapporte le conservateur des monuments et sites du ministère de la Culture. Une constatation des plus alarmantes lorsque l'on sait que Casablanca est considéré comme le berceau de l'humanité au Maroc et que ces recherches apportent beaucoup au niveau mondial. «Nous avons, à plusieurs reprises demandé un parc archéologique, comme il se fait dans le monde, mais personne n'a répondu présent». Des projets de lotissements sont préférés à la recherche, car on juge celle-ci trop peu importante. «Il n'est pas difficile de nous laisser quelques hectares pour clôturer un bâtiment, faire du moulage de surface afin de travailler dans les meilleures conditions», explique Abderrahim Mohib. Ce serait pourtant une manière de rassembler les découvertes et d'en faire le bilan afin de présenter au grand public les découvertes réalisées. Un projet qui, selon le responsable, rapporterait beaucoup d'argent au pays, mais surtout ce serait un moyen pour préserver le savoir et l'histoire de nos ancêtres. La patrimoine archéologique de la ville blanche est unique et internationalement reconnu et il a servi de base pour plusieurs études. Il est donc important de garder cela en mémoire et de tout faire pour le préserver, pour éviter que tout ce travail fourni ne soit vain.
Un contexte géologique exceptionnel
Selon une étude de Fatima-Zohra Sbihi-Alaoui et Jean-Paul Raynal intitulée «Casablanca : Un patrimoine archéologique exceptionnel», la série sédimentaire de Casablanca serait un gigantesque escalier qui s'élève du rivage actuel jusqu'au plateau de l'Aéroport Mohammed V. Chacune de ses marches est un ancien rivage recouvert de dunes. Ces marches ont été taillées par l'océan, lors des périodes interglaciaires majeures, alors que les glaces des pôles avaient partiellement fondu sous l'effet du réchauffement. Les cordons dunaires, pour leur part, se sont édifiés pendant la transition vers les périodes glaciaires, lorsque le volume des océans commençait à diminuer en raison du stockage de l'eau aux pôles terrestres, conséquence du refroidissement global. L'âge des marches va croissant en direction de l'intérieur des terres. C'est un soulèvement de plus de six millions d'années qui est à l'origine de cette disposition originale et exceptionnellement préservée et mise au jour par les travaux d'urbanisme.