Université libre de Bruxelles
Source - http://www.ulb.ac.be/actulb/presse.php
Une équipe belge d’archéologues-plongeurs a localisé et documenté, lors d’une troisième campagne dans les eaux du lac Titicaca en Bolivie, un nouveau site d’offrandes subaquatiques inca et tout un secteur aujourd’hui immergé comprenant des aménagements portuaires, ainsi que les restes d’un cimetière datant de l’époque préinca. Ces découvertes subaquatiques exceptionnelles apportent de nouvelles données décisives pour la compréhension de ce patrimoine méconnu.
Le projet archéologique Huiñaimarca (Université libre de Bruxelles) vient de clore sa troisième mission au lac Titicaca, en collaboration avec la Bolivie. Rassemblant une vingtaine de scientifiques internationaux et privilégiant une approche pluridisciplinaire, l’équipe emmenée par Christophe Delaere (ULB, FNRS) et Marcial Medina Huanca, a fouillé de nouveaux secteurs, repérés suite à l’étude des fluctuations du niveau du lac au cours des siècles. En 6 semaines d’opérations, trois sites exceptionnels ont été localisés et documentés. Plus de 300 heures de plongée ont été nécessaires pour mettre au jour quelques 1600 objets et fragments associés à des cérémonies et autres traces de la vie et des activités des anciens habitants des abords du lac.
Un nouveau site d’offrandes subaquatiques précolombien, similaire à celui fouillé en 2013, a été localisé au large des rives orientales du bassin lagunaire. Un coffret inca en pierre taillée daté du 16e siècle gisait intact à 6 mètres de profondeur, et contenait les offrandes. Ceci démontre que ce type de pratiques rituelles n’était pas exclusif à l’île du Soleil, lieu le plus sacré du lac, mais s’étendait à l’ensemble du Titicaca. La nature même de l’offrande illustre par ailleurs les variantes locales qui pouvaient exister sous l’Empire inca.
Les opérations se sont également concentrées durant 3 semaines en contrebas de la pointe sud de l’île du Soleil, au lieu-dit « Puncu » (« Entrée » en quechua), localisé depuis la fin du 19e siècle par les archéologues. Dans un premier secteur, de nombreux fragments de céramiques incas ont été découverts sous d’épaisses couches de sédiments. La concentration de matériel et la présence d’ancres précolombiennes confirment la présence d’un site portuaire, et témoignent des nombreuses activités liées à la navigation, au commerce et à l’intégration du site dans le réseau cérémoniel insulaire comme accès principal à l’île. Par ailleurs, un autre secteur légèrement en retrait a également été exploré, révélant progressivement de nombreux objets et des restes humains en relation avec du mobilier funéraire. À environ 4 mètres de fond, c’est tout un espace d’occupation terrestre de l’époque Tiwanaku (6e -11e siècle) qui a été révélé. Les archéologues y ont identifié des témoignages d’aménagement des berges, d’activités commerciales, de banquets, de foyers, et la présence de restes de tombes perturbées par les nombreuses variations du niveau du lac dans le passé.
Ces résultats permettent de délimiter plus précisément les anciens rivages précolombiens, lesquels ont varié au cours du temps jusqu’à être aujourd’hui pour la plupart immergés, faussant ainsi la vision que l’on peut avoir de l’occupation humaine à ces endroits. En relation avec le projet Huiñamarca, un programme d’études paléo-environnementales a été mis en place avec l’IRD (France) afin de compléter les données sur les variations du niveau d’eau, ainsi que différents programmes de recherche avec l’Université Paris X, l’ Universidad Mayor de San Andrés (Bolivie) et le laboratoire de robotique de Montpellier (LIRMM). Un nouveau programme de trois ans est en cours d’élaboration en partenariat avec le gouvernement bolivien pour les prochaines années.
Le Projet Huiñaimarca bénéficie du soutien de la Fondation ULB, du Centre de Recherche en Archéologie et Patrimoine de l’ULB, du NEMO 33, de l’UAE, de COLTRI, de Panoramique Terre Productions et du Centre d’Archéologie Subaquatique Andine.